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Conférence : L'homme et son environnement par les films de cinéma

CONFÉRENCE : L'HOMME ET SON ENVIRONNEMENT PAR LES FILMS DE CINÉMA

Dès le début du cinématographe, les frères Lumière sont allés filmer sur toute la planète pour faire découvrir aux spectateurs du monde entier les habitants dans leurs contrées lointaines.

Depuis, la production cinématographique a participé à la sensibilisation et à la connaissance des environnements des sociétés humaines. Mais quel message le cinéma transmet-il sur cette notion d’environnement, y compris dans des films dont le sujet n’est justement pas de traiter de celle-ci. Pour cette conférence, seule la production filmique occidentale sera abordée, sans recherche d’exhaustivité.  

En 2011, Terence Malickintroduit The tree of life par l’opposition entre la Nature qui s’impose à l’Homme et la Grâce, donc la volonté divine, qui l’accompagne. Deux visions différentes de voir le fonctionnement du monde et pourtant si proches, et dans lesquelles les Hommes doivent vivre. Leur environnement est à la fois constitué d’éléments naturels  et d’aménagements de cette nature. La Nature ne donne pas de sens à ce qui est quand la Grâce permet de supporter la brutalité de cette Nature. Tout se mêle alors dans cette séquence qui décrit justement ce qu’est un environnement humain : des fleurs, une maison, une balançoire, une famille, un arbre.

 

QUEL ENVIRONNEMENT ? DE LA TERRE À L’ESPACE

 

La question de l’environnement est une notion qui est toujours difficile à définir. Avec Jeremiah Johnson, Sydney Pollack plonge son personnage interprété par Robert Redford dans le grand ouest américain. En 1972, la proposition du cinéaste semble trancher avec la surenchère urbaine des villes américaines. Il rappelle que les Hommes ont besoin d’éléments simples pour vivre (eau, air…) et doivent s’adapter au territoire en choisissant justement celui qui  leur prodigue les éléments fondamentaux pour  leur survie. Explicitement, Jeremiah Johnson choisit un lieu où s’installer. Ildésigne l’eau apportée par la rivière, une montagne qui le protège des vents et qui procure du bois et du gibier. Son travail lui permet alors d’améliorer ses conditions de vie en transformant ce qui lui est offert par la Nature à l’état sauvage. Mais Pollack insiste encore sur un autre point. Cet environnement qui permet aux Hommes de vivre n’a d’intérêt que si cela permet aussi d’y vivre en famille. Ainsi, Jeremiah s’installe avec une femme – une indienne – et un enfant – qui n’est pas le sien. Et pourtant, cette unité constitue bien une cellule familiale qui va désormais vivre dans un environnement adapté à ses besoins. En quelques séquences, Pollack définit sans didactisme démonstratif la notion d’environnement : un territoire dans lequel une société humaine peut s’adapter par ce que la nature peut apporter.

 

Il est alors amusant que vingt ans plus tard, Robert Redford  reprenne cette thématique de l’adaptation des sociétés humaines face à la nature sauvage. En 1992, il réalise Et au milieu coule une rivièredans lequel le père des héros définit la nature, ce qui entoure les hommes, comme le fruit de phénomènes physiques (ou chimiques) aux vérités intangibles et scientifiquement compréhensible. Mais à cette nature précèderait la parole divine intervenant avant toute création. Là encore, comme chez Malick, l’Homme vivrait dans un environnement mêlant ces deux aspects : Grâce et Nature. Et l’Homme devrait mettre en valeur ces richesses permises par la Grâce par une approche artistique. La pêche à la truite ne doit pas seulement s’effectuer dans le seul objectif d’apporter de la nourriture, elle doit se faire dans une recherche du beau geste pour honorer ce que la Nature procure aux Hommes. La Grâce passe alors par le geste humain.

 

Ainsi, la question d’environnement n’est jamais sans intervention des sociétés humaines. Etienne Chatiliez ne dit pas bien autre chose dans Le bonheur est dans le pré en 1995. Dans cette comédie sur fond de confusion d’identités, le personnage interprété par Michel Serrault se retrouve à la tête d’une exploitation de foie gras dans le Sud-Ouest de la France, observant un équilibre entre respect d’un terroir, respect des animaux et métier pour nourrir les hommes. Certes la ferme dispose d’un abattoir et d’équipements pour fabriquer et conditionner le foie gras des canards, mais Michel Serrault se satisfait du paysage libre de constructions et dont l’aspect, pourtant largement né de l’aménagement humain, change tous les jours au coucher du soleil. Comme une forme de Grâce devant laquelle les sociétés ne peuvent rien si ce n’est que d’essayer d’en préserver la beauté.

 

Cette question d’utilisation des territoires et du respect de l’environnement par les sociétés se voit particulièrement dans Hatari !en 1962. Howard Hawks plonge ses personnages occidentaux en plein Serengeti, en Tanzanie. Dans une succession de séquences, plusieurs communautés africaines exploitent les richesses de ce territoire. Les Masaï utilisent l’eau d’un puits gigantesque avec un système de remontée d’eau à la main. C’est un peuple d’éleveurs dit le personnage interprété par John Wayne. Tandis que la réparation du puits serait faite par une tribu de cultivateurs. Un même environnement  donc mais des rapports différents à la terre. Quant aux Occidentaux présents également, ils exploitent une autre richesse dont la valeur n’est pas alimentaire. Dans le film, ils capturent des animaux sauvages destinés aux zoos américains ou européens. L’environnement de cette partie de l’Afrique est donc le même pour toutes ces populations mais son exploitation diffère. Preuve que l’environnement est une notion qui n’est pas figée comme en témoigne ici le cinéma. Il évolue également par l’élargissement du territoire à un espace qui ne constitue pas a priori un environnement favorable aux sociétés humaines. Par exemple, si la pêche est ancestrale, elle se faisait habituellement en bateau ou par la pose de filets ou de lignes depuis la plage. En 1975, avec Les dents de la mer, Steven Spielberg joue sur ce nouvel usage de l’espace maritime côtier par l’activité touristique récente à l’échelle de l’humanité. Il montre donc que le tourisme a fait de ce bord de mer un nouvel environnement humain. Or il est aussi celui d’espèces animales dont c’est l’environnement naturel et leur servant parfois de garde-manger ! De fait, si le requin n’est pas un prédateur naturel des hommes, il le devient à partir du moment où les humains investissent le territoire des squales, créant un conflit nouveau entre deux espèces ayant pour ambition de dominer leur environnement !

 

L’anticipation permise par les progrès de la conquête spatiale, dans le contexte des premiers hommes envoyés dans l’espace (Gagarine, Glenn), a amené les cinéastes à envisager que l’environnement humain ne se limite d’ailleurs pas aux seuls territoires terrestres mais à l’espace. C’est bien à cela que renvoie 2001 L’Odyssée de l’espacede Stanley Kubrick en 1968. Une ellipse spatio-temporelle fait s’enchaîner au début du film une séquence montrant une tribu d’hommes primitifs ressemblant à des singes avec une séquence présentant une station orbitale habitée. Cette transition permet de voir que les Hommes ont quitté leur micro-territoire pour occuper désormais l’espace grâce au développement technologique. L’environnement ne se conçoit donc pas tant comme un territoire laissé à la Nature mais comme un territoire où existe une interaction entre cette Nature et une civilisation humaine. Un an avant le premier pas sur la Lune, Kubrick n’imagine pas autre chose que de faire de l’espace un environnement nouveau et pas seulement un espace d’aventures pour scientifiques. La même année, La planète des singesde Franklin J. Schaffner, va finalement encore plus loin. Ce n’est pas seulement dans l’espace que les humains redéfinissent un nouvel environnement. C’est sur une autre planète, à des années-lumière de la Terre. Et comme dans les autres films, les astronautes découvrent un territoire, des richesses naturelles qui leur permettraient de survivre, mais aussi des humanoïdes se comportant tels les zèbres de Hatari ! Ils se nourrissent de ce que la terre produit par la cueillette. Dominer ces troupeaux d’humains primitifs serait dominer cet environnement. Sauf que ceux qui dominent  cette planète sont des singes intelligents. Par cette intrusion violente à l’écran de ces animaux habituellement sauvage, le cinéaste démythifie l’idée d’une nature harmonieuse, pure et sans violence dans laquelle les hommes seraient forcément les êtres supérieurs. Face à un environnement hostile, les sociétés humaines ne peuvent être en sécurité et doivent alors affronter d’autres espèces au risque d’être asservies par d’autres animaux.

 

QUAND LE CINÉMA MYTHIFIE LA NATURE

 

Il faut dire que longtemps, le cinéma a véhiculé cette idée de civilisations occidentales nuisant à la nature en rendant leur environnement invivable. Seuls des peuples indigènes, non civilisés (selon les critères occidentaux), vivraient en symbiose dans leur environnement et seraient alors respectueux des espèces vivantes et sauvages les entourant.  Tarzan l’homme singe de W. S. Van Dyke en 1932 ne disait pas autre chose. Il décrit des explorateurs méprisant la vie sauvage de l’Afrique et voulant s’emparer des précieuses défenses d’ivoire d’un mythique cimetière des éléphants. En contre-point, un homme blanc élevé par des singes vit lui en harmonie avec les autres espèces animales, parle leur langage non articulé mais se bat aussi contre des fauves quand sa vie est en jeu. Le cinéma reprend ainsi la théorie du « Bon sauvage » chère à Jean-Jacques Rousseau affirmant que la nature humaine originelle serait animale, primitive et pure mais que la civilisation a progressivement pervertie en l’éloignant de son animalité. La confrontation entre Tarzan et Jane montre d’ailleurs que cet être physiquement parfaitement humain ignore tout des futilités de la mode vestimentaire ou des usages de politesse : un sauvage. Un sauvage certes mais qui n’a aucun des vices des êtres qui se prétendent civilisés.  Et c’est bien ce qui se retrouve dans le King Kong de 1931 comme dans celui de 1976. Ce dernier, réalisé par John Guillermin reprend encore la thématique du singe. Contrairement à Tarzan l’homme singe, le singe est cette fois monstrueux, effrayant et soumettant un peuple jusque-là inconnu des Occidentaux. Or ce peuple a lui aussi constitué une civilisation, une culture, des rites en cohérence avec son environnement. Un rempart a été élaboré pour se protéger de cette menace gorillesque. Pourtant, le film insiste sur un point précis. Certes ce peuple a une religion passant par le sacrifice humain. Mais son niveau de primitivité se manifeste par une totale indifférence à ce qui ressemble à une mare d’hydrocarbure. Or ceci constitue une richesse considérable en cette année 1976, date du film, en pleine post première crise pétrolière. Finalement, ce peuple ignorant n’est menacé que par ce gorille géant devant lequel il a trouvé une solution certes barbare selon nos principes mais manifestement efficace ! La confrontation entre monde civilisé et peuple primitif est récurrente dans le cinéma car cela permet de retrouver les mêmes ressorts dramatiques que dans Les lettres persanes de Montesquieu. Tout comme dans Un indien dans la ville d’Hervé Palud en 1994, il y a d’un côté des « sauvages » qui font avec la nature qui les menace, ce qui peut surprendre le « civilisé » coupé de la vie sauvage, forcément authentique. De l’autre, la culture et la domestication des ressources naturelles qui subjuguent l’indigène d’Amazonie.

 

Mais c’est surtout la destruction que les hommes occidentaux provoquent que le cinéma dénonce régulièrement. En 1985, dans La forêt d’émeraude, John Boorman fait s’affronter dans cette même Amazonie des tribus vivant en osmose avec la forêt avec le monde civilisé qui détruit et fait reculer l’environnement des tribus. Comme si la civilisation impliquait de soumettre la nature apparente à elle. Si les chevaux sont utilisés par Jeremiah Johnson  pour construire sa maison dans le territoire qu’il occupe, ceux de La forêt d’émeraude sont des chevaux vapeurs des machines pour détruire la forêt.. Le peuple des « invisibles » compare d’ailleurs la forêt à un animal dont le recul correspondrait  à la perte d’un organe vital, la peau. Avatar de James Cameron en 2009 ressemble alors au prolongement de cette réflexion sur la surexploitation des ressources naturelles au risque de détruire l’environnement des peuples habitant, cette fois-ci sur une autre planète, Pandora, dont la population vit en symbiose avec la nature de Pandora. Tout comme dans King Kong, tout comme dans La forêt d’émeraude, il y  a un rapport religieux entre les Narvis et leur planète. Comme les Amazoniens, les Narvis luttent contre la destruction de leur environnement  par les machines des Terriens.

 

Cette manière de mythifier la nature comme étant bonne par principe aboutit finalement à lui accorder une intelligence dont ne serait pas pourvue l’humanité. Dans Le monde de Némoen 2003, Andrew Stanton reprend le procédé d’anthropomorphisation habituel de chez Disney mais sert cette-fois un discours dans lequel les Hommes dénatureraient les animaux en les transformant en objets de consommations pouvant être produits comme n’importe quel autre objet.  Les poissons du Monde de Némo ont d’ailleurs conscience d’être des espèces déjà « transformées » par l’Homme se disant originaires non de la mer mais de magasins spécialisés, constituant de fait leur environnement. Némo leur apparaît alors comme un intrus puisque lui vient de l’océan. Par effet de projection, le spectateur réalise que les sociétés humaines n’ont pas seulement élargi leur environnement mais qu’elles dénaturent celui des espèces animales jusqu’à dénaturer les animaux eux-mêmes, perdant leurs comportements… naturels.

 

 

DESTRUCTION OU TRANSFORMATION DE NOTRE ENVIRONNEMENT ?

 

Si le cinéma a souvent défini la notion d’environnement jusqu’à mythifier la Nature et notre rapport à la faune sauvage, il a aussi alerté sur les grands enjeux écologiques, que ce soit dans des films thèses ou à l’intérieur de films dont le sujet n’était absolument pas l’écologie. Ainsi, L’inspecteur Harry de Don Siegel n’est pas connu pour être un film dont le sujet principal repose sur la défense de la forêt de San Francisco. Au contraire, dès les premières séquences, c’est bien l’aspect urbain total de San Francisco qui surgit à l’écran avec ses rues bétonnées et des immeubles par centaines. Pourtant, dans une séquence célèbre, Clint Eastwood alias l’inspecteur Harry, s’inquiète qu’une voiture fasse le guet devant une banque pour un cambriolage. Alors qu’il demande à un patron de snack s’il peut voir si le moteur tourne, signe qu’en effet le conducteur est prêt à partir avec des braqueurs, le patron confirme que de la fumée sort du pot d’échappement. Il rajoute alors que c’est terrible car il provoque de la pollution, nuisant donc à la qualité de l’air. Cette pollution invisible est donc bien dénoncée ici, dans un film de 1971. Preuve s’il en est que la question de la préservation de la qualité de notre environnement est une question finalement assez ancienne, bien antérieure au XXIe siècle. Cette conscience de la pollution par les activités humaines n’est pas seulement pour la pollution atmosphérique. Les Bronzés en 1978puis Les Bronzés font du ski en 1979 de Patrice Leconte évoquaient une autre pollution plus ou moins invisible. Celle des rivages avec des objets jetés dans la mer par les touristes ou habitants, soit celle des montagnes où les touristes jettent leurs détritus recouverts et invisibilisés par la neige, pollution n’apparaissant que le printemps venu. Leconte y dénonce surtout un incivisme assumé et conscient des touristes qui nuisent à cette nature qu’ils aiment fréquenter. Ils nuisent enfin à leur environnement éphémère qui se trouve être l’environnement de ceux vivant en permanence dans les sites touristiques.

 

Aux films évoquant les comportements néfastes des individus occidentaux sans en être le sujet répondent d’autres qui eux abordent frontalement le sujet. En 1972 est produit

Soleil vert, soit la même année que la rédaction du "Rapport Meadows" intitulé Halte à la croissance (Limits to Growth dans sa version originale). Réalisé par Richard Feischer et sorti en salle l’année suivante, le film impose dès le générique un constat édifiant sur l’évolution des sociétés occidentales, commençant par des images d’une époque où les hommes vivaient en harmonie avec la nature. Puis suivent d’autres témoignant des effets néfastes des révolutions industrielles, des images de surproduction, de surconsommation et de sur-urbanisation. En ressort une ambiance d’environnement totalement pollué, accompagné d’un réchauffement de la Terre et d’une surpopulation… Le générique ne montre alors rien d’autre qu’un un environnement qui se dégrade du fait des activités humaines ! Cette surexploitation de la Terre conduit des cinéastes comme Douglas Trumbull à imaginer des solutions alternatives à la pollution de la Terre. Fort du premier pas sur la Lune, il réalise en 1972 Silent running dans lequel l’humanité a été contrainte d’abandonner la planète sur-polluée et de fait à changer d’environnement, l’espace, tout en emportant et conservant ce qui constituait l’environnement « naturel » de l’homme. Comme une sorte d’une « naturothèque » que la majorité des personnages du film estiment être sans intérêt. Par ces séquences, Trumbull critique la rupture de l’homme avec la nature, certains préférant se nourrir de produits sans goût, aseptisés, uniformisés. Comme la nourriture des fast food qui s’est imposée les décennies précédentes. Le plus étonnant est que cette idée d’une Terre totalement invivable du fait de la pollution ne cesse d’être un sujet de cinéma. En 2013, Neill Blompamp réalise Elysium dans lequel seules les populations les plus pauvres vivent sur la surface d’une planète totalement polluée, sans espace vert et naturel, devenue une usine géante, où les habitants sont surveillés par des robots à intelligence artificielle. Les plus riches vivent dans une station orbitale, encore, reconstituant une sorte de Terre idyllique, sans pollution, avec de la végétation et des animaux domestiqués. Une nature aseptisée. Une illusion de paradis terrestre sans la sauvagerie animale. Il n’y a plus de volonté de préserver l’environnement mais bien d’en reconstituer un dont serait exclue la majorité de la population selon des critères sociaux.

 

En 1968, 2001, l’Odyssée de l’espace plaçait déjà des astronautes dans une station orbitale. Et bien avant Elysium, cette station, véritable Terre artificielle était équipée d’ordinateurs devant aider les astronautes. Or, d’après la loi d’Asimov, il est interdit aux robots de nuire aux humains. Kubrick contredit cette loi et HAL. Ce qu’on n’appelait pas encore « Intelligence artificielle » est anthropomorphisé en 1968, comme les poissons du Monde de Némo. Elle devient une menace pour les hommes comme le requin des Dents de la mer dans une sorte de conflit d’usage d’environnement. Car sans l’évoquer explicitement, Kubrick aborde en réalité l’idée qu’un environnement peut difficilement être dominé par deux espèces différentes. Cette intelligence artificielle n’est de fait pas seulement anthropomorphisée de par son nom ou par sa voix, elle l’est par sa capacité à vouloir se défendre, quitte à tuer. Et près de cinquante ans plus tard, la technologie s’est encore perfectionnée. Et étonnamment, c’est à une autre intelligence artificielle non humanoïde que Spike Jonze fait se confronter un homme dans son film Her. Interprété par Joaquin Phoenix, le héros tombe amoureux d’un système d’exploitation qu’il appelle Samantha. Jusqu’alors, l’élargissement de l’environnement des hommes était dans des dimensions géo-physiques, sur la surface de la Terre ou dans l’espace. Les films définissaient les relations entre humains, au milieu d’une nature souvent transformée, aménagée voire reconstituée, avec des animaux domestiqués. Her va plus loin et montre que les humains se révèlent des créateurs d’un nouvel environnement, un environnement numérique, dans lequel ils croient pouvoir évoluer. Or malgré la dépendance de plus en plus exacerbée des sociétés humaines vis-à-vis des IA, Her témoigne de leur autonomie permise par le réseau internet, créant des territoires inaccessibles aux êtres vivants, excluant donc les hommes de ces environnements dont ils ne maîtrisent ni les contours ni les règles. Sauf à couper le réseau. De créature voulant s’émanciper d’une puissance supérieure, l’Homme devient créateur et subit lui aussi la volonté d’indépendance de sa création !

 

Le cinéma n’a donc eu de cesse de définir l’environnement des sociétés, souvent de mythifier des éléments naturels qui constituent cet environnement et enfin signifier la nécessité de préserver un environnement synonyme d’une humanité épanouïe. Andrew Stanton reprend tous ces points dans Wall-Een 2008, recourant au conte, autant pour les enfants que pour les adultes. Comme pour 2001, L’odyssée de l’espace ou Her , des « robots » peuvent être dotés de conscience et de sentiments qui s’expriment par des gestes « humains ». Mais ce n’est ni la mort qu’ils donnent ni la fuite des hommes qu’ils choisissent. Ils savent exprimer des sentiments d’affection entre eux, malgré leurs différences et œuvrent pour l’amélioration de l’environnement d’une Terre devenue poubelle à ciel ouvert. Comme dans Elysium, les humains habitent désormais dans une station orbitale mais le cinéaste montre combien ils ont perdu leur humanité, devenant des êtres sans émotion, voués seulement à consommer des produits formatés. Le robot Wall-E au contraire aime le beau, regarde des comédies musicales, continue sa mission de nettoyage de la planète abandonnée.  L’environnement naturel des Hommes reste la Terre. Et cela passe par le respect de toutes les vies, y compris désormais celles robotiques. Mais surtout,  comme le dernier plan du film l’illustre, par le retour à ce qui symbolise si souvent l’idéal d’un environnement préservé, la plantation d’une pousse qui donnera certainement place à un arbre. Un arbre de la vie.

 

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